À Meulles, l’épicerie qui fait battre le cœur du village

Publié le 6 juin 2025

Depuis mai 2024, une drôle de vache fait bouger Meulles. L’ancien bureau du maire délégué de la localité accueille désormais une épicerie participative et solidaire, 100 % locale, qui veut plus que vendre des produits : rassembler ses habitants.

Accoudés à quelques tables colorées installées devant l’épicerie, les bénévoles de La Vache qui Meulles papotent autour d’un café. Niché au cœur de la mairie de Meulles, localité qui a rejoint la commune nouvelle de Livarot-Pays-d’Auge dans le Calvados, ce commerce a ouvert ses portes en mai dernier. Ici, pas question de faire ses courses en vitesse, les habitants viennent pour acheter des produits locaux mais surtout pour discuter de tout et de rien avec les habitants du coin. Pour Jean-Michel Almeida, président de l’association, c’est d’ailleurs tout l’enjeu de ce commerce.

Lassé de n’avoir aucun lieu pour rencontrer ses voisins, lui, qui troque son costume de directeur marketing pour venir tenir l’épicerie les week-ends, a choisi de redonner vie à son village d’accueil. En découvrant à la télévision Bouge ton coq, une association qui accompagne et subventionne les initiatives pour redynamiser les territoires ruraux, il lui a fallu cinq mois pour mettre sur pied ce commerce participatif et solidaire. Pour s’installer, l’association a reçu plusieurs subventions : 2100 euros de la part de Bouge ton coq pour investir dans les premiers équipements et 3000 euros du Conseil Régional, dans le cadre du dispositif Émergence ESS.

Dynamiser la vie locale autour de produits de la région

« Ici on ne fait pas de bénéfices mais pas de pertes non plus ! », s’exclame Christine Anne, trésorière de La Vache qui Meulles. Et elle y veille au grain. Dans ce commerce associatif, les commandes sont faites en petite quantité et pour ceux qui ont des demandes précises, il faut la prévenir en amont. Une fois les produits dans les rayons, la trésorière, également personnel de direction, diffuse des annonces sur les différents canaux de communication pour prévenir les adhérents des produits restants. 

Pas de bénéfices, mais pas de salariés et pas de clients non plus. Les produits de l’épicerie sont vendus aux prix fixés par les producteurs eux-mêmes. L’épicerie en compte une quarantaine. Tous, installés entre 3 et 42 kilomètres. « On peut y aller à vélo sans souci », souligne Christine Anne, en présentant d’un geste panoramique de la main les produits alignés sur les étagères de cette épicerie à taille humaine.

Pour en bénéficier, il faut adhérer à l’association, dont le coût annuel s’élève à quinze euros. Cet argent permet aux bénévoles de faire tourner l’épicerie : payer les frais bancaires, l’assurance, l’allocation du logiciel de gestion de l’épicerie et le comptable. Mais pas de quoi décourager les habitants de Livarot-Pays-d’Auge qui, au-delà de vouloir concocter des bons petits plats avec des produits issus de leurs territoires, viennent pour échanger avec leurs voisins, dans une ambiance conviviale.

Lutter contre l’isolement social

« En fait, on tient l’épicerie à tour de rôle. On donne de son temps. Deux heures par mois normalement. Mais il y a des gens qui viennent toutes les semaines, parce que ça les sort de chez eux. Ça les sort de l’isolement », explique Jean-Michel Almeida, président de La Vache qui Meulles. Aujourd’hui, sur les 135 foyers adhérents, seule une quarantaine de personnes se relaient pour faire vivre l’épicerie. Mettre en rayon, aller chercher les produits, tenir l’épicerie… Les missions sont nombreuses. Christine Anne le reconnait : l’épicerie, « c’est presque un travail à mi-temps, mais ça en vaut la peine ! »

« L’épicerie n’est qu’un prétexte. Les gens viennent pour créer du lien social, pour se rencontrer. C’est redevenu un poumon du village. »

Avant la création de ce commerce, dans ce bourg de 350 habitants, certains adhérents reconnaissent n’avoir jamais vraiment parlé avec leurs voisins. Aujourd’hui, tout l’enjeu de Jean-Michel Almeida, c’est de faire en sorte que les habitants se rencontrent. « L‘épicerie n’est qu’un prétexte. Les gens viennent pour créer du lien social, pour se rencontrer. C’est redevenu un poumon du village », au moment des courses mais aussi lors de nombreux événements. Concerts dans l’église de Meulles, petits-déjeuners mensuels, marché de Noël… Les membres du bureau de l’association foisonnent d’idées pour « créer ce lien, ce sentiment d’appartenance, d’entraide entre voisins ».

Pour les personnes les plus vulnérables, qui ne peuvent se déplacer ou qui sont malades, l’association a d’ailleurs prévu de mettre en place un système de livraison grâce à un vélo cargo électrique équipé d’un petit coffre. « On attend juste qu’il soit expédié ! », s’amuse le président.

« On ne veut exclure personne avec cette épicerie »

Si 95 % des produits vendus sont issus des producteurs locaux, l’association a également choisi d’agrémenter les étagères de quelques produits issus de la grande distribution, « pour les familles en précarité financière ». Là aussi, les prix fixés sont les mêmes qu’en supermarché. « La solidarité, c’est aussi un volet important parce qu’on ne veut exclure personne avec cette épicerie. On veut que tout le monde puisse trouver son bonheur », conclut Jean-Michel Almeida.

L’année dernière, à l’occasion des fêtes de Noël, ils ont d’ailleurs mis en place un système de paniers solidaires, où chaque personne pouvait ajouter ce qu’elle souhaitait. « Les habitants ont tellement répondu présents qu’on a réussi à en faire un de plus », se réjouit le président de l’association. L’ensemble des paniers ont ensuite été distribués par Guillaume Anne, maire délégué de Meulles, aux familles souffrant de difficultés financières. Grand sourire aux lèvres, Jean-Michel Almeida conclut : « Il a été le père Noël ! »

Juliette Rigaud

L’épicerie est ouverte le vendredi de 16 h à 18 h, le samedi matin de 8h30 à 12h et le dimanche de 8h30 à 11h45. Pendant la période estivale, l’épicerie ouvre également le samedi après-midi.

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Photo : L’épicerie, La Vache qui Meulles, tenue par deux de ses adhérents, samedi 24 mai 2025.