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Multisports au Centre de détention de Val-de-Reuil (27)

Avec un groupe de jeunes détenus

Des ateliers d’écriture créatives animés par Samuel Cahu

Penser son souffle comme une flèche qui fend l’air, faire la liste de ce qui réside dans nos corps, ouvrir des portes en soi dans un lieu où elles restent fermées à double tour. Les sports pratiqués durant ces cinq séances en centre pénitentiaire ont tracéles chemins qui ont mené les participants à se raconter eux-mêmes, apprivoisantuneécriture tantôt factuelle, tantôt poétique, mordante, musicale ou humoristique, réalisantau fil des joursle récit intime de leur séjour en détention.

Comédien, auteur et metteur en scène depuis une vingtaine d’années auprès de multiples compagnies de théâtre, Samuel Cahu aime quand on se raconte des histoires, sur le papier comme sur la scène.

Accompagné par Wilfried, moniteur de sport contractuel au service des sports

Le but était de mettre le sport au service de l’écriture, donc pouvoir alterner sport et écriture pour que les personnes écrivent sur leurs ressentis (sur un temps d’échauffement, ou sur une répétition d’un geste technique, ou sur un temps de challenge). Chaque jour, nous avions un thème et une activité différente. Les détenus se sont vraiment prêtés au jeu durant toute la semaine. Ils ont été respectueux des horaires ainsi que de l’intervenant, très à l’écoute, et également très dans l’échange. Tout le monde a apprécié cette intervention.

Dans mon corps, fatigue, faiblesse, lenteur, manque d’énergie, lucidité, la foi, la mentale, solidité, endurance, patience et de la cogite !
Dans mon corps, il y a un grand manque d’énergie et de la fatigue mais je reste fixé et endurant grâce à la mentale.
Après l’effort, il y a manque de souffle, manque de discernement, ventre qui grogne.
C’est une raquette avec une tige fine et un volant. Les grilles sont comme des barreaux.
La fatigue veut pas que j’m’exprime !
Notre équipe est patiente et endurante. Toujours le moral malgré la défaite.

Dans mon corps il y a des mots multiples qui s’embrasent dans une danse incessante et stressante. La haine s’entremêle de douceur, d’inquiétude, de chagrin. Mon cœur palpite comme un tourbillon de vague-à-l’âme. Mes chevilles craquent sous le haut de mes pieds. La fatigue se transforme en douceur. Une plénitude qui me fait exister en tant qu’homme prisonnier depuis six ans. Voilà mon ressenti en détention.

Marche animale, tribale, je me balade comme une limace. Je suis calme, solitaire destructeur lent. Lenteur, observation de son environnement, déambulation ambiante captive, marche au ralenti, attentive à tout mouvements, à l’écoute, même la nuit, pas de répit. Pour les choses qui vont vite, agite toi lenteur de la vie. Un beau jour, la rapidité du temps te rattrapera aussi. Lointain. Et la lenteur de la vie passe à grand pas.

J’ai tiré. J’ai tendu l’arc. Je me suis concentré. J’ai mis tous mes sens en action, ma motricité en pleine extase. J’ai senti tous mes muscles se tendre ; mon cœur palpiter. Quelle extase.

Je suis la flèche, je tape au sol, je reste inerte, sans vie. Cette fois-ci, je reste perdant.

L’impact jouissif – claquant – absorbant tout son environnement – met en résonance tout son art explosif.

La cible est devenue mon exutoire. Pour un moment, quel sentiment de bien-être parcourt mon esprit ! Je me sens plus léger. Presque en liberté, comme dans une grande volière à taille humaine. Le cours d’un instant, je voudrais qu’on ouvre la cage de l’oiseau.