À Sainte-Marguerite-de-Carrouges, petite commune de 200 habitants nichée dans l’Orne, le Marguerouge redonne vie au village depuis le 30 mai 2024. Ce café associatif, né de l’élan d’habitants engagés, tisse du lien autour de la convivialité et du patrimoine, en particulier de l’église du village.
L’histoire commence avec l’arrivée de Marie-Christine et de son mari, venus du Nord avec dans leurs valises un goût prononcé pour la chaleur humaine et les moments partagés. À leur arrivée, ils découvrent une commune dont la seule association vient d’annoncer sa dissolution. Il faudra deux années de patience, ponctuées de porte-à-porte et de rencontres informelles, pour faire émerger une nouvelle dynamique. En 2019, une association renaît sous l’impulsion de Marie-Christine, ravivant les fêtes communales et instaurant quatre rendez-vous annuels. Peu à peu, des ateliers couture sont également mis en place, instaurant des occasions de se retrouver chaque semaine.
Dans cette dynamique, et face à la fermeture des deux restaurants voisins à Carrouges, l’idée d’un café associatif émerge naturellement. Elle s’inspire des estaminets nordistes, chers au cœur de Marie-Christine. Bien qu’un bar « des sports » existe dans le secteur, son ambiance axée sur les paris hippiques laisse peu de place à une atmosphère familiale. Le besoin d’un lieu plus ouvert, plus inclusif, devient alors évident.
Avec le soutien du nouveau maire, une ancienne grange communale, autrefois abri à panneaux de déneigement, est mise à disposition pour accueillir le futur café. La réhabilitation se fait avec les moyens du bord : un chantier participatif est lancé pour vider le lieu, une dalle en béton est posée pour 1 000 euros, du mobilier est récupéré, les verres donnés, et un comptoir est déniché à 15 euros sur Leboncoin. Dès son ouverture, le lieu fédère. Les habitants choisissent eux-mêmes son nom : Le Marguerouge, en clin d’œil aux Marguerougiens, nom donné aux habitants de la commune. Le logo du café représente quant à lui le dragon rouge de Sainte-Marguerite qui crache des marguerites.
Son emplacement, au cœur du village et juste en face de l’église, n’est pas anodin. Il permet un accès facile pour les habitants et attire également les visiteurs, curieux de découvrir ce joyau du patrimoine local. Comme le rappelle Marie-Christine : « Sainte-Marguerite était autrefois la paroisse de Carrouges. Les seigneurs de Carrouges s’y sont mariés, c’est pourquoi notre village possède une très grande et belle église pour une commune de 200 habitants. » Une seconde association, complémentaire, s’est d’ailleurs formée pour soutenir la restauration de cet édifice. Les deux structures travaillent en bonne entente, animées par un même attachement au territoire et à son histoire.
Chaque semaine, le Marguerouge ouvre le mercredi matin, après le marché de Carrouges et le vendredi soir, autour d’un café ou d’un verre. Côté restauration, les bénévoles proposent des plats cuisinés en bocaux et, clin d’œil aux racines de Marie-Christine, une authentique baraque à frites a été construite par des étudiants en architecture à partir de matériaux de récupération. Et l’élan ne s’arrête pas là : un permis de construire est déposé pour agrandir le café, créer un kiosque pour accueillir concerts et animations, et aménager un espace à l’étage, pensé d’abord pour les jeunes du village, avec baby-foot et jeux partagés.
Marcel, le mari de Marie-Christine, dans la baraque à frites.
Derrière le comptoir, une dizaine de bénévoles, accompagnés de deux jeunes en service civique, assurent les permanences. Chaque visiteur devient membre de l’association pour un euro symbolique, versé à l’achat du premier verre. Ce fonctionnement, qui permet au café de rester juridiquement un espace privé, garantit aussi son autonomie. Les recettes sont intégralement réinvesties dans l’amélioration du lieu, tandis que quelques subventions ponctuelles, comme la Dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR), viennent appuyer les travaux à venir.
Ainsi, à Sainte-Marguerite, un simple café devient moteur de revitalisation rurale. Animé, ce lieu est né du porte-à-porte, et surtout d’un engagement collectif. Il témoigne de ce que peut produire une écoute attentive des envies locales, une capacité à s’adapter aux besoins réels, et la conviction qu’il existe toujours des énergies prêtes à se mobiliser lorsque le projet fait sens.
Nolwen Gouhir (texte – Ardes) et Marine Thomann (photos – Grand-Format)
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