L'aventure du Wip stoppée en plein vol

Publié le 7 juin 2023

Tiers-lieu coopératif ouvert en 2019 à côté de Caen, le Wip dépose le bilan pour raisons économiques. La structure estime ne pas avoir bénéficié d’un soutien financier suffisant, pour se remettre du covid, de la part de son bailleur (Caen la mer).

À Colombelles, à côté de Caen, le Wip entame son dernier mois d’activité. Après moins de quatre ans d’existence, le tiers-lieu doit fermer ses portes le 7 juillet, au terme d’une procédure de redressement judiciaire enclenchée le 10 mai. L’équipe va ainsi continuer d’honorer tous les engagements pris jusqu’à cette date : bals, concerts, événements organisés par des acteurs du territoire. Les quelques semaines restantes laissent la possibilité à un éventuel repreneur de se positionner.

Absence de réponse à la hauteur des difficultés

Le Wip dépose le bilan en raison d’une dette de 350 000 € vis-à-vis de son bailleur, Normandie Aménagement, société d’économie mixte présidée par Caen la mer. Le premier coup porté aux finances du tiers-lieu a été la crise sanitaire, le privant de revenus commerciaux sans qu’il bénéficie pour autant d’aides d’État ou de subvention de fonctionnement. La deuxième raison de l’accumulation de ses créances : la découverte à l’usage de défauts de conception du bâtiment. La Grande Halle ne dispose ainsi que d’un parking de 90 places, pour un lieu pouvant accueillir 1500 personnes. De même, le système de chauffage censé compenser l’absence d’isolation de la grande nef, où se déroule les événements, est inefficace.

Pour les responsables du Wip, la crise sanitaire et ce bâtiment dysfonctionnel ne sont que les déclencheurs. «La cause du dépôt de bilan, c’est qu’on n’a pas eu de réponses à la hauteur de nos difficultés et de l’ambition du projet», assène Hugo Simon, directeur de la structure. Les discussions avec Normandie Aménagement et Caen la mer ont duré pendant un an, mais «les solutions proposées n’étaient ni réalistes, ni pérennes, malgré notre démarche volontariste».

Responsabilité collective

Le lendemain du dépôt de bilan, les élus de Caen la mer se réunissent en conseil communautaire, et le cas du Wip est évoqué par le président de la communauté urbaine et maire de Caen Joël Bruneau. Il rappelle l’investissement des différents partenaires dans la réhabilitation de ce bâtiment du patrimoine industriel, près de 8 millions d’euros dont 5 apportés par Caen la mer. Il assure également que la collectivité «a accompagné le projet autant que possible» et explique qu’elle loue des espaces dans la Grande Halle pour un total 60000 euros par ans. Joël Bruneau estime enfin que les dysfonctionnements du bâtiment sont un non-sujet, puisque «ce n’était pas une surprise pour les preneurs du lieu».

Même si la fin de cette aventure laisse un goût amer à l’équipe du Wip, ils assument avec fierté leur bilan : 40 000 visiteurs et plus de 100 événements par an, 600 porteurs de projets accompagnés, 1 million d’euros de revenus sur le premier exercice post-covid. Ophélie Deyrolles, présidente du Wip et co-initiatrice du projet «regrette sincèrement cette impasse». Elle pointe une «responsabilité collective de l’absence de solution pour faire perdurer l’activité du lieu sur le territoire et son rayonnement national.» Malgré tout, insiste-t-elle, «les graines que nous avons plantées vont essaimer et se développer». Ainsi le projet citoyen du Médialab ou les activités autour du réemploi des matériaux vont se poursuivre d’une autre manière.

[crédit photo : Le Wip]

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