« Ici, on leur propose du travail, du lien, de l’amitié. »

Publié le 28 février 2023

A Sées, depuis 2019, le Secours catholique a investi une ancienne école pour la transformer en une ressourcerie et un lieu d’accueil. Un endroit pour donner une seconde vie à des objets et tenter de réparer ces vies au parcours accidenté.

Sur leurs visages, un sourire de satisfaction. Les cinq hommes sont parvenus à livrer les meubles «aux Arméniens», à Alençon. Une fois arrivés sur place, l’armoire ne passait pas par la cage d’escalier. Qu’à cela ne tienne, le toit du camion a fait office d’échelle, pour parvenir à hisser le meuble par la fenêtre. Après leur mission, Armando, Stéphane, Guillaume, Jordan et Marcel reviennent à «Saint-Pierre». Où la photo de l’échelle improvisée fait le tour des personnes rassemblées ce jour-là dans cette ancienne école investie par le Secours catholique de Sées (61).

«Quand nous sommes arrivés, fin 2019, nous pensions n’utiliser qu’une pièce», se souvient Catherine Charpy, la référente du lieu. Aujourd’hui, le moindre recoin est utilisé pour présenter les objets donnés par des particuliers. De la vaisselle, des meubles, du matériel de puériculture, des jouets, des livres, des DVD, etc. L’ancienne école est devenue une sorte de recyclerie où chacun met la main à la patte, le mardi et le jeudi, pour ranger ou réparer des objets, et les livrer.

Claudine vient ici pour s’occuper, changer d’ambiance. «C’est la première fois de ma vie que je fais du bénévolat», dit-elle avant de raconter son parcours. «J’avais besoin de me vider la tête», ajoute-t-elle. Un bonnet noir sur la tête, Stéphane s’occupe des déménagements. Et oriente les visiteurs du samedi en quête d’un bien à trouver. Marcel répare les petits meubles dans un coin de l’ancienne salle de classe. Ancien cuisto, Jean-Michel prépare le repas pour les partenaires de passage, aux côtés de Patou, qui l’aide en cuisine et assure le service. Et à l’étage, Jean-Luc, ancien sans-abri, repeint une petite pièce qui servira à se mettre à l’écart pour discuter.

Autour des activités proposées se développe du lien social et de la fraternité entre personnes isolées. «Ici, on leur propose du travail, du lien, de l’amitié. On discute beaucoup, et moi je fais beaucoup d’écoute, explique Catherine. Les gens ont besoin de parler. On n’est pas des psys, on oriente dès qu’il le faut… Mais en attendant, beaucoup retrouvent du lien social ici. Moi, je suis comme tout le monde ici, je me sens utile.»

Jordan et Guillaume ont la vingtaine. Ils sont cousins et viennent régulièrement donner un coup de main à Saint-Pierre, en attendant de trouver du travail. «J’aime aider tout le monde», dit Jordan. Sans véhicule, il ne parvient pas à trouver un emploi à Alençon ou Argentan, les villes voisines. «Heureusement que je suis en maison avec mes parents.» «Ces jeunes sont passés par les trous de la raquette, estime Dominique Douchy, le responsable du Secours catholique de Sées. Ils ne devraient pas être ici.» Mais en attendant, il n’y a qu’à Saint-Pierre que ces jeunes sont acceptés et respectés. «C’est assez triste d’avoir autant de succès ici», reconnaît Dominique, qui est cependant fier du travail accompli en trois ans.

Toute l’équipe a de nombreux projets en tête. Comme celle de lancer une cantine solidaire régulière. Ou de faire vivre un jardin partagé qui est en train de sortir de terre… La maison Saint-Pierre, comme certains l’appellent, est devenue une joyeuse fourmilière indispensable à toutes ces personnes.

Simon Gouin (texte) – Hélène Balcer (dessins)

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