Après la mort de Nahel, tué par un policier le 27 juin à Nanterre, les quartiers se sont embrasés dans toute la France. En cinq jours, plus de 3 000 personnes ont été interpellées, principalement des mineurs et des jeunes majeurs. La plupart sont jugés en comparution immédiate.
«J’brûle des feux à Foch, le policier s’fâche, obligé j’le flèche»
Cet extrait du titre Cassage de nuques de Jul était écrit sur le T-shirt de Maxime B. lorsqu’il a été filmé par des caméras de surveillance, dans la nuit du 30 juin devant le centre Paul Doumer à Caen. C’était la cinquième nuit d’émeute après la mort de Nahel. Maxime, 22 ans, venait de donner un coup de pied dans un tas de cartons pour attiser un feu de poubelles. Le feu n’a pas pris, mais Maxime a été interpellé. Aux quatre policiers qui le conduisent en garde à vue, il a dit «Fils de pute» et ««Je vais tous vous cramer dans votre hôtel de police avec vous quatre à l’intérieur». Maxime a passé deux nuits à la maison d’arrêt de Caen avant d’être convoqué en comparution immédiate au tribunal. Dans la salle d’audience, personne de sa connaissance n’est venu. Son avocate est commise d’office.
– Comment avez-vous vécu ces deux nuits? a demandé le président du tribunal au jeune homme qui venait d’arriver menotté dans le boxe vitré.
– Je ne peux pas rester là-bas.
Maxime reconnait les faits qui lui sont reprochés. «De base, je voulais pas le faire, dit-il à la barre. Je me suis fait embarquer bêtement. L’effet de groupe, l’alcool, l’adrénaline….
– Et les insultes? interroge le président du tribunal
– Le baqueux m’avait insulté avant.
– Et les menaces? Vous comprenez que dans le contexte actuel, ça passe très mal?
«Il n’y a pas de prise de conscience de la part de ces jeunes, assène la procureure. Vous nous dites tous la même chose: j’avais bu, j’ai été entraîné par un copain. Il n’y a plus de respect des règles. Si vous étiez restés chez vous, ce ne serait pas arrivé.»
Chez lui, c’est une chambre dans un foyer de jeunes travailleurs qu’il a obtenue depuis peu. Il a dormi pendant un an dans une voiture. Plus jeune, il a grandi en foyer et en famille d’accueil, a beaucoup fugué. Mais aujourd’hui, il est suivi par le Service d’aide aux jeunes en difficulté, il a décroché un CAP cuisine et travaille dans un restaurant qui promet de l’embaucher. Ces perspectives d’insertion vont lui éviter la case prison. Maxime est condamné à 4 mois avec sursis et à indemniser les quatre policiers, assorti de l’obligation de travailler ou de chercher du travail. Le tribunal a considéré que la détention risquait de compromettre cette fragile réinsertion du jeune majeur.
Marylène Carre