Depuis la découverte du Covid 19, un «nouveau monde» est né. La propagation aiguë du virus a participé à l’affolement non seulement du peuple, mais aussi de l’Etat qui a pris plusieurs mesures sanitaires pour arrêter cette pandémie. Masques, confinement, gestes barrières, vaccin, pass sanitaire obligatoire… La France s’est mobilisée, mais à quel prix ?
En France, le vaccin pour tous a été mis en place en juin 2021. Si une grande partie de la population a opté pour se faire vacciner, une autre partie refuse catégoriquement. L’annonce du pass obligatoire le 12 juillet 2021 par le Président Macron a entrainé une vague d’immunisation, mais aussi des mouvements de protestation partout en France. Notamment à Caen, où plus de la moitié de la population est pourtant vaccinée. Rencontre avec l’un des organisateurs de ces manifestations « anti-pass » du samedi, Cédric, militant communiste et révolutionnaire de 35 ans.
« Je n’ai rien contre le vaccin, ce qui me dérange, c’est l’obligation du pass sanitaire pour continuer à vivre notre vie normalement. Pour moi, c’est une obligation de se faire vacciner déguisée et donc une atteinte à notre liberté. C’est donc la façon dont Macron met les choses en place qui me dérange le plus. Il ne dit pas clairement les choses et préfère nous mentir ».
Cédric conteste la méthode répressive et le manque de considération du peuple, particulièrement dans les quartiers populaires. « On sait que ce sont les habitants des quartiers populaires qui sont le moins vaccinés. Pour moi, il y a un problème d’ignorance et de méfiance par rapport au monde médical qui peut être assez condescendant avec le peuple et au lieu d’utiliser d’autres méthodes pour obtenir leur consentement, on utilise des méthodes répressives.»
Une logique de discrimination de classes
La jeunesse dans les quartiers populaires est plus touchée par le pass sanitaire qui met encore plus une limite à leur liberté déjà très réduite. D’après INJEP, l’Institution Nationale de la Jeunesse et de l’Education Populaire, déjà 10% des enfants sont exclus de toute pratique sportive ou culturelle : « Il y a une logique de discrimination des classes, car les lieux comme les restaurants et les cinémas ne leur sont déjà pas aussi accessibles, et là, à cause du pass sanitaire on les exclue encore plus.»
«Ce qui me motive vraiment à faire ses manifestations, c’est d’abord le processus de défendre mes idées politiques, mais aussi le fait que ça soit un mouvement social singulier et inhabituel. C’est la première fois qu’il y a une mobilisation qui se passe en plein été et qui prend autant d’ampleur à cette saison de l’année. Par ailleurs, c’est une manifestation qui concerne toute la population, car le pass freine la liberté de tous. Il est donc important, de montrer que dans ce mouvement, il n y a pas seulement des anti-vaccins et des réactionnaires ».
Pour le militant communiste, le mouvement rejoint aussi celui contre la réforme des retraites, passée avec le pass, et des gilets jaunes. «Au début, on était près de 3 000 tous les samedis, à marcher dans les rues pour monter qu’on est contre la réforme des retraites et pas seulement contre le pass sanitaire. On voulait reprendre les mouvements sociétaux et militer pour que les modes d’action soient un peu plus qualitatifs et audacieux, qu’il ne s’agit pas seulement de faire un défilé en faisant des actions symboliques.»
Désobéissance citoyenne
Une manifestation en particulier reste dans les mémoires, celle du 11 septembre, où les manifestants se sont infiltrés dans certains lieux ou le pass sanitaire est obligatoire, comme le cinéma Pathé, aux Rives de l’Orne, ou la piscine du centre-ville « C’est une question de rapport de force, on voulait montrer une détermination en faisant quelque chose qui n’est pas autorisé. L’accomplissement de ce projet, montre une bonne cohésion du cortège et une manière d’être efficace dans l’action. On ne s’est pas contenté du défilé autorisé, prévu et organisé; on a fait quelque chose d’illégal en prenant tous les risques qui s’ensuivent, avec la police, mais aussi la justice.» Or, parmi les manifestants, il y a alors peu de militants habitués aux rapports de force. L’effet de surprise a permis d’éviter la confrontation, notamment avec les forces de police, qui se montreront beaucoup plus nombreuses les semaines suivantes. Le nombre de manifestants s’est aussi réduit, passant de 3 000 cet été à 300 en octobre. Mais le mouvement persiste.
Sabrina Stanojevic
Revue d’actualité des étudiants : des articles rédigés par des étudiants de licence 3e année Humanités Numériques de l’Université de Caen, en octobre et novembre 2021, dans le cadre d’un module d’écriture journalistique encadré par Grand Format.