« Même si on fait quelque chose, ça sert à rien. »

Ce jeudi 28 septembre 2023, nous avons interrogé des étudiants du campus 1 de l’Université de Caen à propos de l’éco-anxiété, en leur posant la question suivante: «Les problèmes liés à l’écologie constituent-ils une source d’anxiété dans votre vie de tous les jours?».

Certains étudiants ont une vision pessimiste vis-à-vis de l’écologie :

Jeanne:
«Il y a une certaine forme de culpabilisation, en nous répétant constamment que c’est compliqué de remonter la pente, que les icebergs fondent, qu’il y aura plein de virus qui arriveront, donc c’est assez compliqué à vivre au quotidien. Tout le monde en parle, les médias, les proches, les gens que l’on ne fréquentent pas forcément. Par exemple, les médias sont très accès sur l’écologie parce que c’est très important d’en parler.»

Polux:
«Oui beaucoup. J’essaye de me tenir au courant de tout ce qui se passe et on a rarement de bonne nouvelle sur ce genre de sujet, c’est toujours: «on a dépassé telle date limite, on a dépassé telle réserve, ceci va disparaître». Bientôt il n’y aura plus d’eau. On est obligé de faire des réserves d’eau parce que c’est quelque chose de vital. C’est un truc auquel je pense tous les jours. D’un autre côté, ce qui me fait encore plus angoisser c’est que si je pouvais faire quelque chose je le ferai évidemment, mais c’est pas moi, ni même nous particuliers qui vont faire quelque chose. C’est les grandes entreprises qui doivent changer leurs façons de faire et d’agir. Celles qui polluent comme Total, Google, ChatGPT, l’IA, toutes les GAFA. On doit faire quelque chose, prendre de certaines habitudes, vivre de façon plus écologique. Mais malheureusement, c’est pas à notre échelle que ça va changer. Il faut se lever et aller foutre un bon coup de pied au cul à toutes ces grandes entreprises qui ne bougent pas le leur. C’est ça qui m’angoisse le plus, on pourrait crever, ils s’en foutent. Il faut vraiment les attaquer sur les choses qui leur tiennent le plus à cœur et malheureusement toutes les actions militantes ne changent rien, en tout cas à mon avis. Donc il faut vraiment faire des trucs plus violents. Il va vraiment falloir sortir les grands moyens pour les faire changer et c’est même pas sûr que ça les fasse changer.»

«C’est décourageant parce que je me dis qu’on n’a pas la main sur notre avenir.»

Anaëlle:
«Dans un sens oui parce que quand tu vois souvent les rappels des scientifiques qui nous disent: «les gars, c’est chaud là, on n’a plus grand-chose là» et que par exemple notre cher président M. Macron, quand tu vois qu’il promet de faire des actions en faveur de l’écologie et qu’après il prend son jet privé pour faire un aller-retour Paris-Normandie, ce qu’il pourrait faire en train en 2h. Tout ça fout les boules et c’est angoissant d’une certaine façon. Tu te dis que tu auras beau faire le tri, tu auras beau faire ce que tu peux, tu auras toujours des gens qui s’en moquent. Et ça fait chier parce qu’on a l’impression qu’on a beau faire quelque chose, ça change rien. Ce sont ceux qui prennent des jets privés, les usines qui polluent le plus ou par exemple les publicités toujours allumées qu’on pourrait éteindre. Tout ça donne l’impression que même si tu fais tout bien de ton côté, avec ta famille qui fait le tri, ça changera pas grand-chose. On est pas ceux qui polluent le plus et ça m’angoisse un peu et c’est décourageant parce que je me dis qu’on n’a pas la main sur notre avenir. Moi qui essaye de faire au maximum de mon petit côté pour ne pas trop polluer, prendre les transports en commun ou ne pas trop prendre ma voiture, au final tout se casse la gueule parce qu’il y a des gens qui pourraient faire des efforts, par exemple notre cher président, mais ils n’en font pas et on est un peu démuni malgré tout.»

En revanche, d’autres ne laissent pas l’écologie les inquiéter:

Chloé:
«Non parce que j’estime que si je fais ce qui faut pour participer à l’écologie de la planète, j’ai pas à m’en inquiéter. Par contre, je vais m’inquiéter pour les autres, ceux qui s’en fichent et qui ne respecteraient pas forcement le tri sélectif par exemple. Ça ne m’inquiète pas si je fais ce qu’il faut. Si par exemple, moi je fais le tri sélectif mais que par derrière tous les déchets sont mis dans le même sac, là je m’inquiète un petit peu plus. »

Juliette:
«Pas vraiment parce que je considère que ce que je fais à ma petite échelle même si je sais que c’est pas suffisant, ça me rassure assez. J’ose espérer que tout le monde fait pareil, ça me provoque pas tant de panique que ça»

Nicolas:
«En vrai pas tellement parce que je fais des trucs pour pas que cela empire, comme du militantisme par exemple ou du tractage. Aussi dans les repas de famille dans lesquels on arrête pas de dire aux parents et grands-parents que cela ne suffit pas de séparer les déchets, de trier ou d’acheter du bio. C’est à coté de la plaque. Ils confondent tout, le fait qu’un produit soit bio et qu’il vienne de l’autre bout du monde, le fait qu’il soit emballé ou par quoi il est transporté. Il y a énormément de confusion sur ce sujet là, sachant depuis combien de temps c’est dans le débat public.»

Ninon:
«Je ne dirai pas que ça constitue une anxiété, mais c’est vrai que quand tu vois certaines personnes qui s’en foutent et qui ne vont rien faire pour être écologique, ça peut énerver. Je dirai pas que je suis une personne très écologiquement engagée mais on peut faire les gestes simples. Quand je vois des personnes qui ont des poubelles jaunes et qui mettent tout le verre et le carton dans leur poubelle, là ça m’énerve un peu, on peut dire que ça m’angoisse. Par contre, je ne sais pas si ça a une place très importante.»

Catt:
«Oui mais en soi je milite, ça permet d’avoir l’impression d’être utile et de ne pas me noyer dans cette anxiété.»

Propos recueillis par Mélody Dufrêne et Théo Brillet, étudiants de L3 d’Humanités Numériques.

Les résidences

De quelques jours à plusieurs semaines, les journalistes et photographes de Grand-Format s’immergent dans un établissement scolaire, une médiathèque, une ville... pour y mener des ateliers d’éducation aux médias et un travail journalistique. Avec des jeunes et des moins jeunes, nous construisons ensemble ces éditions spéciales de Grand-Format issues de ces résidences.