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« Je postulais dans la restauration. Mais je n’avais que des refus. »

Samba*, est originaire d’un pays d’Afrique. Arrivé en France à l’âge de 18 ans, il raconte comment il a fait face à des discriminations et des propos racistes.

Samba a entamé son parcours dans la restauration dans son pays d’origine, en Afrique, où il a rapidement assumé le rôle de pourvoyeur de sa famille suite au décès de son père. Il confie : «Je suis l’aîné, donc il fallait que j’arrive à subvenir aux besoins de la famille, et à partir de là, le premier truc que j’ai fait, c’est la restauration. Pour moi, c’était plus facile pour gagner de l’argent.» La restauration est devenue bien plus qu’un métier, une véritable passion qui ne l’a jamais quitté.

À l’âge de 18 ans, Samba quitte son pays pour la France. Son intégration dans ce nouveau pays a été grandement facilitée par une famille française qu’il a rencontrée en Afrique. Établie à Ouistreham, cette famille tenait une crêperie où Samba a rapidement trouvé sa place. « Quand vous arrivez comme ça, vous êtes dans une famille, c’est différent. J’étais protégé. […] je n’étais pas dépaysé », explique-t-il. Cette protection lui a permis d’éviter les difficultés rencontrées par de nombreux nouveaux arrivants, notamment en termes de logement et de racisme.

Face à l’adversité

Le parcours de Samba est marqué par la confrontation à la discrimination, tant directe qu’indirecte, lors de sa recherche d’emploi. «Quand il s’agissait de chercher du boulot, c’est là que j’ai commencé à être confronté à la réalité des choses», raconte-t-il. Samba a souvent été confronté à des situations où les postes semblaient déjà pourvus malgré les offres affichées, lui laissant entendre qu’il était victime de discrimination. « Si vous remarquez bien, même dans les magasins, qu’est-ce qu’il y a ? Ce sont des noirs qui sont des vigiles », pointe-t-il. Il constate des faits similaires en restauration « Ce sont des noirs dans la cuisine, à l’arrière-cuisine, à la plonge, ou des trucs comme ça […] ils ne veulent pas que nous soyons visibles, on nous cache derrière ».

Lors d’une expérience professionnelle, Samba reçoit des paroles teintées de racisme de la part de son directeur, ce dernier lui déclarant ouvertement son aversion envers les personnes de couleur. Malgré cette injustice, Samba refuse de répondre à la provocation par la violence. Cependant, il exprime son dégoût pour de tels comportements: «Oui ça fait mal. Des fois tu entends des mots vraiment durs […] Ils ne se rendent pas compte qu’il y a des gens qui essayent de tout faire pour s’intégrer.» Face à cette situation, Samba décide de ne pas engager de poursuites judiciaires, optant plutôt pour une réaction résolue en déclarant : «Je vais vous laisser avec votre médiocrité et partir. Il m’a payé et je suis parti, je l’ai laissé comme ça.» Deux mois après cet incident, le directeur a été licencié, relate Samba, qui estime que « quand on fait du mal, on le paye, ça nous retombe dessus ».

«J’ai fait comme tous les blacks, je suis devenu agent de sécurité.»

Samba raconte ses démarches de recherche d’emploi entre ses 22 ans et ses 29 ans, et les difficultés rencontrées « Je postulais dans la restauration, que j’aimais. Mais je n’avais que des refus. Ou sinon, ils voulaient me mettre derrière. » Après ces refus dans ce secteur, Samba a dû faire face à une dure réalité : celle de devoir embrasser une voie professionnelle qui ne correspondait pas à ses aspirations premières. «Donc j’ai fait comme tous les blacks, je suis allé postuler en tant qu’agent de sécurité», confie-t-il, soulignant le manque de choix qui l’a poussé à s’engager dans cette direction. Bien que conscient que ce travail ne soit pas celui qu’il affectionne, il a pris cette décision par nécessité. Malgré ces défis, Samba est resté plus de 18 ans dans ce domaine, tout en gardant en tête la cuisine. Il s’est toujours dit « « Si je travaille dans un restaurant, ce sera le mien ».Un rêve qu’il parviendra à réaliser quelques années plus tard. «Quand l’heure de manger a sonné que tu sois blanc, noir, tu viens, tu manges.»

Pour Samba, «il ne faut pas mettre tout le monde dans le même sac ». Insistant sur la diversité des individus, il met en garde contre la généralisation hâtive. Selon lui, les personnes racistes sont souvent celles qui n’ont pas l’opportunité de découvrir d’autres cultures à travers les voyages. Encourageant l’ouverture d’esprit et la curiosité envers l’autre, il évoque avec émotion les valeurs de partage qu’il a observées dans son pays d’origine. Exprimant son désir de transmettre ces enseignements à ses enfants, il pointe du doigt les préjugés véhiculés par les médias, particulièrement chez les jeunes. Discuter du racisme est essentiel pour favoriser la compréhension mutuelle et combattre les stéréotypes.

Propos recueillis par Léonie, Manon, Lillie, Lisa, Eglantine

* Prénom d’emprunt

Léonie, Manon, Lillie, Lisa, Églantine