La CAF du Calvados ne veut plus financer le Planning Familial 

Publié le 7 novembre 2025

Le Planning familial est menacé par la baisse des subventions publiques. Dans le Calvados, l’association, qui milite pour un accès inconditionnel à la contraception et à l’avortement, n’est plus soutenue par la Caisse d’allocations familiales.

C’est un nouveau coup dur pour l’association, qui a vu ses subventions publiques diminuer depuis trois ans. Sa dernière demande adressée à la CAF a essuyé un refus. Un de plus, qui s’inscrit dans une tendance nationale inquiétante. Baisse de 10% du montant des subventions du département du Loiret, réduction de 20% de celles de la Drôme (et fermeture de sept centres de santé sexuelle) et suppression totale de celles du conseil régional des Pays de la Loire. Ces coupes budgétaires sont des « choix politiques », dénonce le Planning Familial, qui regroupe 82 associations locales. Elles s’inscrivent dans un « contexte global » de mesures conservatrices et de remise en cause des droits des femmes et des personnes LGBTQIA+. « S’attaquer au Planning Familial, c’est s’attaquer aux droits sexuels et reproductifs », dont l’accès à la contraception gratuite, à l’avortement, à la prévention des IST, à l’éducation à la sexualité, à la prise en charge des personnes victimes de violences conjugales.

Le Planning n’est plus « dans les orientations de la CAF »

Dans le Calvados, le Planning familial a réalisé près de 2 000 entretiens en 2024. Les besoins sont particulièrement marqués autour de l’IVG, de la contraception et des violences : les entretiens liés à ce dernier sujet ont doublé, avec près de 40 % de ces témoignages faisant état de viols.

L’association a perdu successivement les subventions qu’elle recevait des villes (Caen, Colombelles et la Touques). L’Agence régionale de santé (ARS) et la Direction régionale aux droits des femmes et à l’égalité (DRDFE), ses principaux financeurs, ont comblé le manque en augmentant leur prise en charge. Mais l’extension de la Prime Ségur a mis l’association en difficulté : les primes ne sont pas compensées ou le seront avec retard. En 2023, elle apprend de manière officieuse d’abord, puis officielle, la fin de la subvention annuelle de fonctionnement de la Caisse d’allocations familiales (CAF), « soit 5 000 euros ces dernières années », rembobine Noémie Sabourin, co-présidente du Planning Familial 14. Raison invoquée : l’action du Planning Familial « ne correspond pas aux orientations portées par le Conseil d’administration de la CAF ». Celles-ci ont-elles changé ? L’association n’a pas eu de réponse à sa demande d’explication. Alors elle se demande si la décision a un lien avec la campagne de communication nationale de l’association relative aux personnes trans, diffusée quelques semaines plus tôt. On y voit notamment une photo d’un homme « enceint », qui avait fait vivement réagir les milieux conservateurs. Dans une tribune publiée dans Le Point, un collectif d’intellectuels et de médecins avaient accusé le Planning d’être devenu « le refuge de militants transactivistes » et réclamait la fin des subventions publiques et des actions d’éducation à la sexualité de l’association dans les écoles, collèges et lycées.

Au nom du principe de neutralité

En août 2024, le Planning Familial et quatre autres associations du département (la Ligue de l’enseignement, les Franca, le Centre d’information du droit des femmes et de la famille et les Petits débrouillards), reçoivent un courrier de rappel à l’ordre de la CAF. Celle-ci menace de couper les subventions, en raison de supposés manquements au principe de neutralité « tel qu’il est inscrit dans les conventions d’attribution de subvention et rappelé comme principe dans la charte de laïcité ». Le Planning Familial, comme les autres associations, ignorent en réalité ce qui leur ait reproché. Mais toutes ont pris position contre le RN lors des législatives de 2024 (lire l’enquête du Poulpe à ce sujet). La demande de subvention du Planning Familial pour 2025 est refusée.

En mars 2025, l’association obtient un rendez-vous avec la direction de la CAF. « Il nous ont expliqué que la lettre était issue d’une décision du Conseil d’administration, explique Noémie Sabo, qu’il n’y avait plus de subvention de fonctionnement mais que nous pouvions demander pour 2025 une subvention pour un projet. » L’association dépose en juillet une demande de financement de 5 000 euros pour un projet de soutien à la parentalité dans le cadre de violences intrafamiliales. Dans le dossier, elle détaille les missions qui seront confiées à deux conseillères conjugales, formées spécifiquement : soutenir les femmes victimes de violences dans leur rôle parental, faciliter les relations parents enfants, accompagner les parents vers les lieux ressources… Le Planning familial vient de recevoir la sanction : la CAF du Calvados refuse de soutenir le projet, sans motiver sa décision.

En août dernier, le député socialiste Arthur Delaporte a interpellé la ministre déléguée à l’égalité entre les femmes et les hommes sur « la situation préoccupante » que traverse l’association et appelé à la mise en place d’un « plan de soutien pérenne au réseau des Plannings familiaux, incluant des moyens permettant de sécuriser leurs missions sur l’ensemble du territoire ».

Malgré plusieurs tentatives, nous n’avons pas réussi à obtenir de réponses de la direction ou du conseil d’administration de la CAF du Calvados.